Une nouvelle édition du Hellfest est passée, et dans l’ensemble, c’est sans grande surprise qu’on peut la qualifier de réussite, en dépit des sempiternelles épreuves à surmonter : la chaleur éreintante sur les trois premiers jours, la grosse pluie sur le dernier, la circulation au sein du site difficile selon les heures (oserait-on demander à ce que la jauge de fréquentation soit revue à la baisse un jour ?)… Mais il n’empêche que le HELLFEST sait offrir une affiche mémorable composée de mastodontes cultissimes offrant généralement satisfaction, et de groupes émergents au sommet de leur forme. Rien de bien étonnant par rapport aux éditions précédentes – même si une formule de 4 jours, c’est beaucoup trop ! Nous vous invitons à revivre ce long week-end clissonnais avec nous. Bonne lecture, et merci d’être là…
Reportage par Lucinda. Photos par Julien Zannoni (sauf lorsque mentionné)
UN POINT SUR… LE CAMPING
Avant de me lancer dans les concerts, il me paraissait important d’aborder ici la question camping, étant passée par cette étape pour la première fois depuis que je me rends au Hellfest. Pour ceux qui ne le sauraient pas, l’Easy Camp permet aux festivaliers, moyennant finance, de camper sur place (jusque là, tout va bien), mais sans qu’ils aient besoin d’apporter leur propre matériel de camping (par opposition à la zone de camping dit « sauvage » proposé gratuitement). D’un côté, nous trouvons les tentes en carton, petites, sujettes aux intempéries (même si elles ont été protégées des averses par des sacs en plastique, le dernier jour), mais contenant le nécessaire de couchage et de toilette. De l’autre, les tipis, vraies tentes spacieuses pour deux, quatre, cinq ou six personnes. Et ces derniers sont plutôt satisfaisants.
Le contenu de notre tipi ? Six matelas en mousse, des draps jetables, une serviette-éponge par personne, le fameux kit toilette (brosse à dents clippable, échantillon de dentifrice, gel douche et shampooing), et une lampe de camping. Nous disposons également de sacs poubelle tricolores pour effectuer notre tri lors de notre séjour. On nous indique que le stock de cadenas est épuisé, mais heureusement, nous n’avons déploré aucune intrusion ou vol.
Dans l’ensemble, mis à part la chaleur quasi insupportable à l’intérieur du tipi dès 9h du matin les trois premiers jours, notre expérience a été plutôt confortable. On accueille à bras ouverts la possibilité d’acheter son petit-déjeuner tous les matins au stand de café, de jus de fruits et de viennoiseries. De plus, un petit snack qui vend notamment des huîtres (!) et des crêpes sucrées est ouvert une grande partie de la journée. Dommage qu’en boissons fraîches, nous n’ayons d’autre choix que du Perrier.
Seul gros point à revoir selon moi (et en en discutant avec d’autres campeurs plus habitués, cela ne date pas d’hier) : le nombre trop limité de toilettes sèches. Le matin, les hommes ont la possibilité de se rendre directement aux pissotières, quand nous femmes devions parfois patienter entre quinze et trente minutes devant les toilettes, toutes situées au même endroit du camping. Pourquoi ne pas simplement installer la même chose en doublon (y compris les douches), de l’autre côté du terrain pour éviter cette attente pénible de bon matin ? Et puis, on aimerait bénéficier d’eau chaude après 10h du matin… Des points sur lesquels l’organisation du festival ne devrait pas lésiner, une bonne fois pour toutes.
En revanche, on ne peut qu’admettre que les bénévoles ont une fois de plus imposé le respect lors de ce long week-end. Dès notre arrivée au camping, un bénévole fort sympathique nous accompagne jusqu’à notre tente et nous explique tout ce qu’il faut savoir sur l’Easy Camp. Parmi les autres cas concrets sur site, j’aimerais faire remarquer que des agents d’entretien étaient souvent présents pour nettoyer les cabines des toilettes ou pour recharger en papier. Personnellement, je n’ai jamais souffert de toilettes particulièrement sales (si on excepte les traces de boue le dimanche). Et quand une dame âgée victime des fortes chaleurs a fait un malaise devant moi, la sécurité a mis en tout et pour tout trois minutes à arriver et intervenir. Bravo à eux, le Hellfest a bien de la chance de les avoir !
Pour en savoir plus sur les évolutions apportées au Hellfest en 2023, je vous renvoie au reportage très complet de Deborah.
PLACE AUX… CONCERTS

Photo par Lucinda
Jeudi 15 juin, jour 1
En sortant du camping, je constate la présence au Metal Corner d’un trampoline à sensations fortes : le festivalier est harnaché et tenu par de gros élastiques avant d’être catapulté à toute vitesse en l’air par l’opérateur au sol. Une attraction qui a visiblement rencontré beaucoup de succès. Pourquoi pas !
Arrivée au Hellcity Square pour faire un tour sous les tentes de l’Extreme Market, qui sont toujours aussi insupportables lorsqu’il fait très chaud dehors. Un meilleur système d’aération devrait sérieusement être mis en place – du reste, cela augmenterait le pouvoir d’achat des festivaliers…
A 13h, les Dessinateurs de catch à moustaches se chargent de nous distraire sur la Hellstage, scénette du Hellcity Square, alors que le soleil atteint son zénith. Dommage que la présentation par l’animateur tire en longueur, d’autant que l’absence d’ombre et d’abri nous fait perdre un peu patience. Mais cette version humoristique et artistique du catch-spectacle a le mérite d’apporter de l’originalité au préambule de cette édition.
Je patiente ensuite devant l’entrée de l’espace VIP encore fermé, car une réunion nous attend à l’espace presse. C’est la première fois (à ma connaissance) que cela est mis en place, et l’organisation nous en a même notifiés la veille par mail. Je prends alors connaissance d’un concours de cri à l’entrée principale, ce qui a le don de taper sur les nerfs… Etait-ce judicieux de placer ce genre de chose ici, de façon à ce que chaque festivalier ait à subir ça ?
L’espace VIP n’ayant toujours pas ouvert à 15h, horaire où la réunion aurait dû démarrer, je me vois forcée d’abandonner, car le concert de LOCOMUERTE, vus plus tôt ce mois-ci en première partie de DROPDEAD CHAOS, à Paris, est sur le point de commencer. Le groupe renverse la scène à coup de metalcore en espagnol, et on adore admirer le chanteur Et Termito gesticuler allègrement, bien à sa manière. La vigueur et la bonne humeur sont toujours au rendez-vous. Contre toute attente, ils accueillent sur scène Stef Buriez (LOUDBLAST) – événement que j’ai loupé, car je suis partie en cours de route m’abriter de la chaleur accablante…

Nous voilà enfin sur le site principal du Hellfest, fourmillant allègrement, profitant de l’herbe tant qu’elle est verte et fraîche. Il n’y a pas à dire : cela fait plaisir d’être de retour.
Plus tard, après m’être restaurée au Food Corner (celui-là aussi nous avait manqué), je me dirige vers les Mainstages : IN FLAMES est en place. Premier constat pas si anodin : les noms des scènes au-dessus des Main ont disparu, supprimant ainsi le peu de pollution visuelle qu’il restait – on est à des lieues des décorations bariolées de 2016, et c’est tant mieux.
Ainsi, nous avons droit à une setlist énergique revenant même sur le premier album. La batterie, bien que trop forte, nous fait néanmoins profiter du talent de l’excellent Tanner Wayne. Bien que le groupe soit visiblement plus que rodé, il n’empêche qu’ils ont toujours l’air de prendre du plaisir à jouer. Le son est globalement très bon, même si la guitare soliste aurait pu être davantage mise en avant. A la fin du set, Anders Fridén mentionne THE ARCHITECTS qui joue sur la Main 2 après eux, et assure que leur concert sera « putain de génial ». Il indique qu’il a l’intention d’aller boire une bière avant d’assister au concert de KISS.
Un passage sous la Temple nous permet d’assister quelques instants au show visuellement prenant des « ineffables rois du black metal » : DARK FUNERAL, dont les effets pyros soulignent les compos’ enfériques des Suédois.

Dark Funeral

Me voilà en place pour le concert de KISS, que je n’ai, curieusement, pas encore eu l’occasion de voir en action. De gigantesques statues gonflables à l’effigie des quatre membres, de part et d’autre de la Main 1, sont d’ores et déjà érigées durant le concert de ARCHITECTS sur la Main 2, juste avant. Mes impressions ? Ça explose, ça paillette, ça flambe, ça se déhanche, ça s’élève sur des plateformes, ça crache autant de bave que de faux sang (du moins, quand on s’appelle Gene Simmons)… Bref, KISS souhaite se montrer à la hauteur de sa réputation, et y parvient. On déplore quelques longueurs – l’heure tardive, sans compter la chaleur et la fatigue accumulée sur cette première journée n’aident pas.
Paul Stanley nous garantit qu’ils vont à la fois jouer « de vieux morceaux, mais aussi des morceaux encore plus vieux », preuve qu’ils assument le fait de n’avoir rien sorti récemment. L’excès de confettis nous empêche d’y voir quoique ce soit à la fin de la performance, mais ajoutés à l’enchaînement final de I Was Made for Lovin’ You et Rock and Roll All Nite (qui auraient toutefois pu être un peu mieux dispatchés au sein de la setlist), ils nous réveillent un peu.
Fait indéniable : quiconque passe après KISS se doit d’assurer niveau scénique. Et c’est PARKWAY DRIVE qui a la lourde tâche de réveiller les nombreux festivaliers restés devant les Mainstages pour eux. Mais c’était sans compter la capacité des Australiens à tout balayer sur leur passage, chose que nous avions déjà constaté au Brutal Assault en 2019 : non seulement Winston McCall et ses acolytes parviennent à réanimer la marée somnolente que nous constituons, ils se classent d’office parmi les meilleures prestations de cette édition… Et nous n’en sommes qu’à la première journée ! Les compos’ aussi explosives qu’intenses du groupe se voient magnifiées par des effets pyrotechniques couvrant toute la longueur de la scène, tandis que des hommes encapuchonnés munis de torches ouvrent le bal et réapparaissent au rappel, offrant une touche mystique à la performance. Sur Shadow Boxing, c’est un ensemble à cordes, composé de musiciennes françaises, qui viennent exhausser le caractère plus sombre et mystérieux de leur musique. Puis, Winston rejoint la foule en délire pour la surplomber et la faire s’agiter tout autour de lui sur Idols and Anchors… Énergique et impeccable ! On a tellement de pêche après ça qu’on filerait presque au Macumba, la scène du camping, pour danser une heure de plus… Mais la fatigue l’emporte.

Kiss
Vendredi 16 juin, jour 2
C’est sous la Temple que ma journée démarre, et sous le signe marseillais, qui plus est. Les tridents sont dressés sur scène pour ACOD, qui offre un set rempli de compos’ toutes plus intenses les unes que les autres. Fred, au chant, n’hésite pas à s’exclamer un « Enfin ! » de contentement, le groupe ayant déjà joué au Hellfest Cult mais faisant partie de l’affiche officielle pour la toute première fois. Mon seul concert du groupe date d’ailleurs de 2017, lorsqu’ils s’étaient produits dans le cadre de la Hellfest Warm up, au Moulin de Marseille, et au temps de l’ancien lineup. Jouer au sein du festival en lui-même cette année n’est donc que justice.
Les orchestrations, bien audibles, soutiennent le tout, et les effets de fumée encadrent joliment la prestation. A noter la très bonne participation d’Antoine (ex-STONEHORNS), en tant que guitariste de session. Le set passe à toute allure et nous permet d’entamer cette deuxième journée d’une bien belle manière.
AKIAVEL prend la suite sur la même scène pour un concert à marquer dans les annales. Les Marseillais ont été rajoutés à la dernière minute en remplacement de 1914 – et ce, à ma grande satisfaction, n’ayant encore jamais pu assister à une de leurs performances. Les quatre membres sont heureux de jouer ici, à en juger les larges sourires et les échanges avec le public. La foule, déjà bien en place pour ACOD, est d’ailleurs composée de pas mal de sudistes venus pour encourager ses groupes.
Avant même que le concert démarre, on entend des « Auré ! » d’encouragement à l’attention de la chanteuse. Et que dire de cette dernière, si ce n’est que son jeu de poupée maléfique nous captive tout au long du set, tandis que ses cris extrêmement variés accompagnent les titres coup de poing du groupe avec violence ? En outre, ses interactions avec Jay (basse) et Chris (guitare) démontrent une réelle cohésion de groupe.
Bref, AKIAVEL a satisfait nos attentes, et c’est donc avec joie qu’on accueille un rappel tout particulier, tandis que trois invités-surprise les rejoignent sur scène pour une reprise de SEPULTURA, Roots Bloody Roots. Ce petit cadeau ne nous est pas offert sans raison, puisque le groupe et ses invités ont souhaité nous sensibiliser sur les actions menés par Savage Lands, organisation de préservation de l’environnement. Ainsi, Sylvain Demercastel, co-initiateur du projet, et Nils Courbaron (DROPDEAD CHAOS, SIRENIA), membre d’honneur, regagnent la scène aux guitares, tandis que Niko (TAGADA JONES) se joint à Auré au micro. Quel final !
De retour devant les Main pour apercevoir de loin PAPA ROACH nous jouer une succession de tubes bien connus de la Terre entière, dont, évidemment, Getting Away with Murder et Last Resort. Jacobby profite de la diffusion du concert sur internet pour saluer leurs familles « qui regardent à la maison ». Avec pas moins de trois hommages (THE CURE, DR DRE et THE PRODIGY), les Américains finissent de ravir la fosse en furie qui adore reconnaitre tous ces airs. Le chanteur, qui descend à la rencontre des premiers rangs, demandera à deux reprises aux festivaliers de reculer afin de laisser les premiers rangs contre la barrière respirer, et vérifie d’un « Are you alright? » sincère si les spectateurs vont bien. C’est dire à quel point les festivaliers sont en furie !
Juste après, DEF LEPPARD apparaît comme une promenade de santé. Le groupe culte offre un concert foncièrement « feel good » sans apparat particulier, où ils alternent entre titres anciens et tout récents, sans que cela crée de clivage. Les fans nostalgiques chantent avec Joe Eliott et dansent gaiement, et je ne peux cacher mon admiration face au jeu de Rick Allen à la batterie. Un bon moment qui nous permet de souffler.
Je fais une pause avant de revenir vers les Main pour jeter un œil à la prestation de MACHINE GUN KELLY qui semble avoir attiré ce soir une population bien à lui. Vers la fin du concert, le chanteur descendra devant les premiers rangs, et fera un doigt d’honneur à la caméra en souriant. La fin très abrupte, causée par un bref au revoir du chanteur et suivie d’un petit film énigmatique sur les écrans géants, est sûrement la raison pour laquelle le public n’a pas hésité à huer l’Américain à la fin… Réaction peut-être excessive de leur part, même si on a connu des artistes plus reconnaissants envers leur audience.

Def Leppard

Machine Gun Kelly
MÖTLEY CRÜE faisait partie des groupes que je tenais à ne pas rater, n’ayant absolument aucune idée de ce à quoi je devais m’attendre. Leur premier passage à Clisson depuis 2012 fait pourtant partie de mes plus grandes déceptions : force est de constater que les pratiques du groupe – demander à voir les seins des femmes dans la fosse, par exemple, démontrent leur incapacité à évoluer ou à faire preuve d’un minimum de bon sens dans le monde actuel. Le focus des caméras sur les deux danseuses en petite tenue manque d’intérêt, sans compter les statues gonflables de femme cyborg qui, selon moi, ne font aucun sens.
On reconnaît que le duo avec MACHINE GUN KELLY fonctionne bien pour The Dirt, titre qui a servi à nommer le biopic du groupe dans lequel MGK lui-même interprète le rôle de Tommy Lee. Le fait que ce dernier se place au piano à queue est également une surprise à laquelle je ne m’attendais pas. Dans l’ensemble, on se souviendra de ce concert, mais pas nécessairement pour les bonnes raisons !
SUM 41, au contraire, parvient à agiter les foules bien plus efficacement et avec moins de distractions inutiles ou maladroites. On admet néanmoins que les Américains ont concocté LA setlist idéale pour les fans de première heure, avec des tubes bien ancrés dans leur époque. D’ailleurs, aucun titre sorti après 2007 n’est joué. On peut toutefois leur pardonner le recours à cette facilité, dans la mesure où SUM 41 a annoncé leur séparation prévue pour 2024.
Ainsi, Deryck se permet le petit plaisir de jouer des segments de Smoke on the Water et Seven Nation Army à la guitare. Cela ne parasite en rien le concert, mais reflète la volonté du groupe de savourer chaque instant avant les adieux. Deryck aborde le fait que le groupe se produira le 23 novembre 2024 à Paris et encourage tout le monde à venir assister à cette ultime date dans notre pays.

Mötley Crüe

Sum 41
SAMEDI 17 JUIN, JOUR 3
Nous démarrons la journée par l’enchantement et la douceur des Norvégiens de KALANDRA sous la Temple. Découverts en première partie de LEPROUS à l’hiver dernier, j’avais été ravie d’apprendre qu’ils feraient partie de cette édition. L’excellente Katrine Stenbekk nous subjugue avec sa justesse et son timbre aérien – c’est d’ailleurs, pour moi, la première « grande voix » que j’ai le plaisir d’entendre sur cette édition. Après Helvegen, reprise de HEILUNG, la performance s’achève comme à l’accoutumée sur Brave New World. L’efficacité du titre et de la performance dans son ensemble accueillent les acclamations du public.
Arrivée en cours de route à cause de la conférence de presse de PORCUPINE TREE (quelle idée de la programmer en même temps !), je n’ai la possibilité d’assister qu’aux trois derniers morceaux de RIVERSIDE, le groupe de Mariusz Duda, également connu pour son excellent projet LUNATIC SOUL. Si la complexité à laquelle j’avais déjà accroché sur CD parvient néanmoins à me faire entrer directement dans le show, j’ai la volonté de les revoir en salle, sans faute.
L’autre conférence de presse prévue aujourd’hui est donnée par Sharon den Adel et Stefan Helleblad, respectivement chanteuse et guitariste de WITHIN TEMPTATION. Je suis de nouveau forcée de chambouler mon planning, les conférences étant annoncées à la dernière minute en espace presse, et dois hélas rater PUSCIFER. A la question « pourquoi avoir sorti des titres goutte à goutte ces dernières années ? », la chanteuse et le guitariste répondent que cela permet de rester d’actualité sur une plus longue période – une tactique déjà coutumière dans d’autres styles de musique comme la pop. Même s’ils confirment la sortie prochaine d’un album, ils admettent que ce format a tendance à n’enflammer la presse que quelques semaines avant que l’engouement ne s’éteigne complètement. Sortir un single de temps à autre permet ainsi de raviver l’intérêt des médias un peu plus régulièrement.

Porcupine Tree en conférence de presse – Photo par Lucinda
Le prochain concert auquel j’assiste est un nouvel immanquable, puisque vient le tour de mes adorés PORCUPINE TREE : tout fan du groupe n’a pas eu d’autre choix que d’assister à cette performance. La raison première est simple : la formation de Steven Wilson a repris les concerts l’année passée après plus d’une décennie d’inactivité et suite à la sortie d’un nouvel album qu’on n’attendait pas, et les rares concerts qui auront lieu en 2023 ne laissent aucunement présager que le groupe poursuivra dans sa lancée. Cette hypothèse a été confirmée par le groupe plus tôt dans la journée, lors de la conférence en espace presse. Ils souhaitent en effet garder leur liberté de faire ou de ne pas faire, ne pas être contraints par des deadlines, ou être forcé de composer s’ils n’en ressentent pas le besoin.
Je ne suis donc que plus ravie de voir PORCUPINE TREE se produire devant moi en ce jour. Entre deux morceaux, Steven affirme que le groupe a reçu une dizaine d’offres pour jouer cet été, mais qu’ils ont opté pour le Hellfest, estimant qu’il s’agit du festival « le plus ouvert d’esprit ». Et heureusement, car ceux qui connaissaient le groupe de loin ont dû trouver les premières minutes du concert quelque peu difficiles à assimiler, sans compter les nombreux moments planants. Et bien sûr, on est loin de la grosse prod’ et de l’aspect immersif à laquelle nous avions eu droit en novembre dernier, au Zénith de Paris. Mais les Anglais parviennent à proposer des titres fournis en riffs et contenter, espérons-le, les fans d’IRON MAIDEN déjà postés devant la Main 1. Quel ravissement d’entendre la bombe Anesthetize qui semble réconcilier tout le monde ! Et ce n’est clairement pas moi, dont c’est le titre favori, qui m’en plaindrai. J’ai raté FINNTROLL pour eux, mais l’amour inconditionnel a parlé.

Iron Maiden – Photo par Lucinda
IRON MAIDEN débarque alors pour nous offrir, sans surprise, une soirée mémorable. Le capital sympathie de notre Bruce parvient comme toujours à attendrir chacun des spectateurs, avec ses interventions en français. Le dernier album se mêle plutôt bien aux tubes légendaires, même si on est surpris de l’absence de certaines bombes issues de leur très vaste discographie. Afin d’introduire Can I Play with Madness, Bruce s’interroge sur la traduction en français de « madness », et prétend deviner que cela se dit « founess » ! Bien tenté, Bruce.
Malgré tout, on avait le souvenir que le groupe avait déployé d’avantage de moyens lors de leur dernier passage à Clisson, en 2018, ce qui avait donné une performance bien plus phénoménale. Ici, on est un peu moins dans le spectaculaire, en dépit du duel avec un Eddie monté sur échasses qui interagit également avec le reste du groupe. Il n’en demeure pas moins incontestable que le groupe âgé de presque cinquante ans est un des rares à conserver sa classe et sa jeunesse sans en faire des tonnes (KISS, c’est à vous qu’on s’adresse), et sans la moindre ringardise (MÖTLEY CRÜE, si vous nous lisez…).
Je découvre alors la scénographie de WITHIN TEMPTATION, nettement différente de celle de 2018 au Zénith de Paris (dernière date à laquelle j’ai assisté) : au centre, une énorme structure représentant un visage de cyborg fragmenté attire tous les regards, et précède les écrans géants.

Within Temptation en conférence de presse – Photo par Lucinda
Généralement, le groupe de Sharon den Adel ne nous déçoit pas. En ce jour, néanmoins, on les sent particulièrement passionnés. Ouvrir sur l’apocalyptique Our Solemn Hour demeure une valeur sûre, et l’interprète donnera tout ce qu’elle a durant la performance. Le reste de la setlist, bien équilibrée, fait aussi la part belle aux derniers titres sortis les uns après les autres ces trois dernières années, comme Wireless, et une exclusivité surprenante et énergique encore jamais jouée sur scène, du nom de Bleed Out.
Mais ce sont bien des titres tels que Paradise (What About Us?), In The Middle of the Night et Raise Your Banner qui encensent le plus la foule. Sharon dédie d’ailleurs ce dernier à la guerre en Ukraine avec émotion, et on la sent encore plus à fleur de peau lorsqu’elle parle de son père décédé il y a quelques années avant Supernova, titre écrit en son honneur. Tout ceci procure indéniablement une intensité certaine au concert, qui s’achève en beauté sur le merveilleux Mother Earth.
Pas de répit pour cette fin de soirée, car j’enchaîne avec CARPENTER BRUT, qui clôt cette journée sur la Main 1. En 2018, c’est sous une Temple bien remplie que le Français avait fait bouger les foules, en fermeture de festival. Mais il faut avouer que le programmer sur une des Main est bien plus judicieux, étant donné sa popularité grandissante.
Certains concerts auront été une véritable épreuve à traverser, surtout lorsqu’on se situait dans les premiers rangs – c’était le cas de PAPA ROACH ou (alerte divulgâchis) ELECTRIC CALLBOY. Pour en avoir fait l’expérience, survivre aux pogos associés aux slams continus relevait de l’exploit lors du concert de CARPENTER BRUT. Mais quelle extase, néanmoins ! C’est une authentique fiestas des enfers à laquelle nous participons. Au départ plutôt endormis, les spectateurs se voient comme endiablés et électrifiés au son de Day Stalker, Disco Zombi Italia ou encore Turbo Killer.
Bien qu’il soit compliqué d’en profiter pleinement, étant donné la bataille qui a lieu tout autour de moi, on a la chance d’avoir sur scène la majorité des invités présents sur le dernier album « Leather Terror » (2022), lui-même joué dans sa quasi-totalité – Greg Puciato (ex-THE DILLINGER ESCAPE PLAN), Persha, Gunship, Johannes Andersson (TRIBULATION) et pour terminer, mais pas des moindres, Yann Ligner (KLONE). L’arrivée sur scène de ce dernier pour Maniac, aussi fan que je sois, est difficile à savourer à 100%. Il s’agira néanmoins d’un des meilleurs concerts de cette édition. Une pluie brève mais salvatrice vient nous récompenser juste après le concert, alors que nous quittons le site.

Photo par Lucinda
DIMANCHE 18 JUIN, JOUR 4
On ne savait pas à quoi nous attendre côté météo en cette ultime journée, car on nous annonçait tout et son contraire les jours précédents. Au réveil, on a le plaisir de savourer des températures bien plus clémentes dans le tipi. Les nuages s’amoncellent alors en fin de matinée, et c’est une véritable douche qui s’abat sur Clisson ! Ce déluge me dissuade de sortir de la tente, et je loupe malheureusement THE OLD DEAD TREE.
L’accalmie aidant, je m’achemine vers le site pour HALESTORM – ironie du sort étant donné le nom du groupe, c’est au début de ce concert que la pluie stoppe complètement. Sans introduction préalable, les écrans géants affichent un gros plan de Lzzy Hale, en coulisses, en train de pousser une étonnante vocalise dans son micro, guitare déjà en place sur l’épaule. Ce choix artistique pourrait résumer la performance qui a suivi : le charisme naturel de la chanteuse américaine, associé à sa voix digne d’une Whitney Houston du rock, reçoit largement l’approbation de l’audience et aura été le sel du passage de HALESTORM au Hellfest. On serait à la limite de l’ostentation, mais le fait est que la chanteuse parvient à nous émouvoir, ce qui procure du sens – et de l’authenticité, à cet étalage de talent.
À côté de cela, pas de fioriture, aucun décor, simplement les trois musiciens qui s’amusent comme des petits fous et jouent leur musique pour soutenir leur leader, d’autant qu’aujourd’hui, le guitariste Joe Hottinger fête ses vingt ans dans le groupe, comme nous l’indique Lzzy. Arejay Hale, à la batterie, sortira néanmoins des baguettes de taille démesurée en guise d’amuse-foule, et Lzzy ne s’empêche pas de s’agenouiller devant nous pour une performance a capella. À n’en pas douter, l’un des concerts les plus mémorables de l’édition.
Lorsque ELECTRIC CALLBOY a été annoncé au sein de la programmation, on ne doutait pas une seconde que les rois allemands du kitsch renversent tout sur leur passage. Aujourd’hui, c’est une majorité de gens vêtus de mille couleurs flashy, coiffés de perruques mulets et arborant divers accessoires rappelant l’univers barré du groupe qui peuple la foule. J’ai beau me positionner loin de la scène, c’est le chaos un peu partout. Les « circle pits » n’en finissent plus de se former, que ce soit près ou loin des premiers rangs, et les festivaliers forcent le passage à coup de chenilles interminables.
Il est difficile de profiter de la performance, même si une part de moi ne peut s’empêcher de danser au rythme endiablé de Spaceman, Hypa Hypa ou Pump It. ELECTRIC CALLBOY nous laisse peu de répit, et on ne leur en demandait pas moins. Les airs sont scandés par la marée de fans, et on en entend certains chantonner les mélodies alors que le concert est terminé depuis belle lurette. Soutien total à AMON AMARTH qui doit prendre la suite juste à côté !

Electric Callboy

TENACIOUS D, ou LA raison pour laquelle cette édition était pour moi immanquable, prend place en début de soirée sur la Main 1. Après avoir loupé leur passage à Paris en février 2020, il était impensable que je me prive de leur présence sur cette édition, me poussant, hélas, à tirer un trait sur le concert de DANCE WITH THE DEAD qui se tient en même temps en Valley… Mais zéro regret ! Le duo Jack Black – Kyle Gass débarque sur scène dans toute la dignité qu’on leur connait, habillés de t-shirts bariolés, et régale durant 1h10 les fans de The Pick Of Destiny, film parodique faussement autobiographique (et cultissime) sorti en 2006.
Le fait de lier tous les morceaux de leur set au moyen d’interludes et d’interactions comiques nous donne l’impression d’assister à un véritable spectacle humoristique, que ce soit au moyen de leur fausse dispute juste avant Dude, ou lorsqu’ils suspectent que leur guitariste est possédé afin d’introduire le légendaire Beelzeboss. Chaque prise de parole de la part de Mr Black est bue par l’audience.
Décidément, après MÖTLEY CRÜE et KISS, on a encore droit à une statue gonflable – il s’agit néanmoins de notre favorite, puisque c’est le Diable lui-même qui vient tenir compagnie aux Américains sur scène. Jack Black affirmera qu’il s’agit du « meilleur Satan du festival ». Néanmoins, le « rock » de TENACIOUS D parviendra à terrasser le Maître des Enfers sur Beelzeboss – la déclaration de Jack Black (« we defeated Satan with our rock ») se voit corrigée par celle de Kyle Gass : « We deflated Satan with our cock » (on vous laisse traduire ça sur les sites spécialisés si le sens vous échappe…).
Afin d’appuyer toujours plus l’aspect parodique, Jack Black humilie expressément Biff, qui interprète le responsable des effets pyrotechniques, et qui semble incapable de synchroniser son travail aux morceaux. Il y « arrivera » finalement sur les notes finales du show. Un grand merci au Hellfest de les avoir programmés !

Tenacious D – Photo par Julien Reynaud

Tenacious D – Photo par Julien Reynaud
Quelques plaintes ont été émises au sujet du concert de SLIPKNOT, notamment au niveau de la qualité du son. En effet, certains fans positionnés face à la Mainstage 1 indiquent une absence de basses. Quant au son face à la Mainstage 2, c’est justement l’excès de sonorités lourdes qui rendent mon expérience peu profitable. Qu’à cela ne tienne, les fans sont dans l’ensemble ravis. Pour ma part, je ne suis pas convaincue par ce concert, qui ferme cette seizième édition, même si je ne peux pas rester de marbre à l’écoute d’un titre tel que The Devil in I. À plusieurs reprises, Corey Taylor fait mention de l’absence de Clown, forcé de rentrer aux États-Unis pour problèmes personnels, et motive la foule à lui faire entendre à quel point nous sommes bruyants de l’autre côté de l’Atlantique. Le chanteur mentionne également les autres groupes américains présents sur cette édition, dont INCUBUS… il ne semble pas être au courant que ces derniers ont annulé à la dernière minute pour être remplacés par les Espagnols de CRISIX. La gaffe, Corey !
Le feu d’artifice, bien qu’il ne présente pas d’originalité par rapport à ceux de l’année précédente – que ce soit vis à vis de la musique d’accompagnement ou de la diversité des effets en eux-mêmes, nous permet comme à son habitude d’apporter une clôture festive à cette édition. Le mini-film annonce alors les dates de mise en vente des pass 2024 : le 27 juin 2023… Jamais les pass n’auront été vendus aussi tôt ! Depuis, le Hellfest a heureusement coupé la poire en deux en proposant deux sessions de vente – si celle en juin a bien été maintenue (tous les billets ont bien entendu été vendus en un rien de temps), d’autres metalleux pourront tenter leur chance cet Automne pour une seconde vague…
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TOP 5
1) PARKWAY DRIVE
2) CARPENTER BRUT
3) TENACIOUS D
4) WITHIN TEMPTATION
5) AKIAVEL & IRON MAIDEN

Photo par Lucinda
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Merci à Philippe Albertini et Julien Reynaud.